Imazighen dans le monde
« Je ne suis pas de ceux qui dénient, qui renient La bonté dans les mœurs de nos ancêtres. Mais l’homme de progrès est celui qui œuvre A trancher les jougs qui humilient notre dignité... » Matoub lounes
Imazighen forment
un groupe de peuples dont on retrouve les traces, à diverses époques,
depuis l’Égypte jusqu’à l’Atlantique et du Niger à la Méditerranée.
Aussi
loin qu’on remonte dans le passé, l’Afrique du Nord est occupée par imazighen, connus des historiens grecs et latins sous des noms divers :
Garamantes du Sahara, Maures et Sanhadjas implantés dans la zone
intermédiaire Algérie-Mali-Maroc, Numides et Gétules de Tunisie et d’Algérie, Nasamons et Psyles de Lybie, ...etc.
Des Phéniciens aux Romains
Jusqu’à
l’époque romaine, ces peuples, apparentés au moins par la langue,
persévéraient dans une civilisation néolithique. Pasteurs,
agriculteurs, ils vivaient divisés en tribus ; la division restera un
fait constant et essentiel de l’histoire amazigh.A la variété
originelle du peuplement, se sont superposées, au fil de l’histoire,
les influences de plusieurs civilisations.Le Maroc que le seul détroit
de Gibraltar sépare de l’Europe, fut au moins dès le IIIème millénaire
en relation avec l’Espagne.
Dès
la fin du IIème millénaire av. J.-C. , Imazighen entrèrent en
relation commerciales intermitentes avec les Phéniciens qui fondèrent
,vers 1100 av. J.-C., sur la côte atlantique le comptoir de Lixus (auj.
Tchemmich), puis plus près du détroit, ceux de Tingis (Tanger) et
d’Abyle. Imazighen subirent ensuite l’influence de Carthage qui
fonda des comptoirs sur la côte méditerranéenne. Ainsi les
carthaginois, qui ont commercé plusieurs siècles avec les Berbères,
leur ont apporté non seulement l’or, la vigne et certaines méthodes
agricoles, mais aussi de nouveaux rites religieux.
Au IIIème
s. av. J.-C., sur le peuple des Massyles établis entre Constantine et
l’actuelle frontière tunisienne, régnait le premier roi amazigh connu
Masinissa qui avec l’alliance des Romains, fonda le royaume de Numidie.
En échange Massinissa apporta son aide à Scipion l’Africain contre
Carthage.A la chute de Carthage, en 146 avant J.-C., les romains se
sont imposés militairement dans tout le Maghreb ; mais leur pénétration
, limitée de surcroît à la partie nord n’a sûrement pas eu la même
portée que la précédente.
Imazighen et l’Antiquité Romaine :
La province romaine d’Afrique se limitait à l’origine au territoire carthaginois annexé par Rome
et borné à l’ouest par la "Fossa regia" qui, partant de Tabarka , se
dirigeant vers le sud est pour atteindre la côte au sud de la ville
actuelle de Sfax. A l’ouest de cette Afrique romaine, s’étendait , au
IIème s. av. J.-C., le royaume de Numidie contre lequel Rome dut mener
une dure guerre au temps de Jugurtha (113/105 av. J.-C.), un autre
grand-chef berbère, petit fils de Massinissa. Une partie du royaume de
Numidie, après la défaite de Jugurtha, fut donné par Rome au roi de
Mauritanie Bocchus qui livra Jugurtha aux Romains.
A l’époque
des guerres civiles, le roi numide Juba Ier fut entraîné dans
l’alliance avec les pompéiens contre César.Ce dernier, après avoir
vaincu les pompéiens à Thapsus (46 av. J.-C.), modifia l’organisation
de l’Afrique romaine en créant à l’ouest de la "Fossa regia" , avec
l’ancien royaume de Numidie annexé, une "Africa nova". Les deux
provinces d’ "Africa vetus" et d’ "Africa nova" d’abord confié à
Lépide, passèrent en 36 av. J.-C. à Auguste, qui annexa le reste de la
Numidie (25 av. J.-C.) et dédommagea le fils de Juba Ier, Juba II, amazigh romanisé, savant, collectionneur d’objets d’art, en lui donnant
la Mauritanie. Mais celle-ci fut à son tour incorporée à l’Empire en 40
apr. J.-C. dans le but d’essayer d’étendre la domination romaine à tout
le Maghreb, les Berbères se soulevèrent, obligeant finalement les
Romains à se cantonner dans la partie septentrionale du Maroc actuel,
où ils établirent les colonies de Tingis, Zilis, Lixus et Volubilis ;
la civilisation amazigh se perpétuant dans les montagnes.
Dès
le milieu du IIIème s., l’autorité romaine fut gravement menacée par
l’agitation des tribus amazigh, et, en 285, Dioclétien dut ramener le
"limes" romain en cette région à l’oued Loukkos, ce qui réduisait en
fait la Mauritanie Tingitane à la région de Tanger, qui fut rattachée
administrativement à la province espagnole de Bétique. Malgré les
incessants soulèvements des tribus amazigh, les romains surent donner
au maghreb un remarquable essor économique, construisirent les villes
de Volubilis , Tipasa, Timgad, Lambèse, Cherchell,...etc et
pratiquèrent une politique d’assimilation qui ne réussit pourtant pas à
faire disparaître l’originalité berbère.
Les vandales qui
envahirent et ruinèrent le maghreb au Vème siècle ne parvinrent pas
plus à soumettre lmazighen. Le maghreb reconquis par Bélissaire
(entré à Carthage après sa victoire sur Gélimer à Tricamarum en 533),
resta sous l’autorité nominale de l’empire d’Orient pendant plus d’un
siècle.Mais la domination byzantine se fit rapidement détester par les
excès de sa fiscalité, et l’ afrique du Nord tomba dans l’anarchie au
VIIème s.
Imazighen au temps des conquêtes arabes :
A
la conquête arabe, qui commença en 647, à cette date les fidèles de
Mahomet sont en Tunisie. Les arabes furent au début peu nombreux : au
VIIème s., 5 000 à 10 000 combattants de Sidi Okba Ben Nafi, le premier
conquérant, puis les 100 000 à 200 000 membres des tribus de Beni Hilal
et Beni Soleim, qui au XIème s. achevèrent de convertir le Maghreb. Imazighen opposèrent une longue résistance, incarnée par le chef de
l’Aurès, Koçaila, puis par une femme, la Kahina, que certains
historiens ont pu surnommer la Jeanne d’Arc amazigh (vers 695). Sans
doute lmazighen devaient-ils, au cours du VIIIème s., se convertir
massivement à l’islam : en 711 un groupe de Berbères fraichement
convertis passent sous les ordres de Tariq le détroit de Gibraltar.
Mais leur résistance continua de s’exprimer par leur adhésion à
l’hérésie kharidjite , ce qui déclencha en 740, une nouvelle révolte.
Les Arabes ne parvinrent à rétablir la situation qu’à partir de 761.
Renonçant alors à la politique d’exactions des débuts de la conquête,
ils laissèrent s’épanouir le particularisme berbère dans les royaumes
des Idrissides , des Aghlabides et de Tahert . Cependant l’entente ne
devait pas durer longtemps entre Arabes et Berbères : à la fin du IXème
s. , ceux-ci se rallièrent à une nouvelle hérésie religieuse, le
chiisme, très différente du kharidjisme, mais qui leur permettait
d’exprimer leur soif d’indépendance. Cependant, après le départ des
Fatimides pour Le Caire et les ravages de l’invasion hilalienne, c’est
au nom du sunnisme orthodoxe que la réaction des Berbères s’exprima, au
XIème s., avec les Almoravides , puis avec les Almohades . Ces derniers
réalisèrent - fait unique dans l’histoire - l’unité du Maghreb, mais,
au XIIIème s., l’Empire almohade commença à se fractionner pour donner
naissance à de nouvelles dynasties amazigh, les Mérinides de Fès, les
Abdelwadides de Tlemcen, les Hafsides de Tunis.
Tout en
opposant aux envahisseurs successifs des résistances farouches, lmazighen seront rarement capables de former des Etats organisés : ils
se latiniseront, avant de s’islamiser, mais en affirmant leur
particularité à travers des civilisations d’emprunt.
Imazighen dans le monde d’aujourd'hui.
On ne peut après ce
que l’on vient de lire nier l’existence d’une certaine authenticité amazigh : il existe au Maghreb un particularisme amazigh comme il
existe en France un particularisme corse ou breton. Dans trois des
Etats d’Afrique du Nord, les amazighophones sont minoritaires : en
Libye où ils ne survivent que dans le djebel Nafoussa, en Tunisie où
ils peuplent une douzaine de villages épars à Djerba et autour des Matmata, en Mauritanie où subsistent 2 ou 3 tribus dans la région de Nouakchott.
Au maroc ils représentent env. 65 % de la population marocaine où ils sont
essentiellement concentrés dans le Rif, l’Atlas, le Sous. En Algérie
ils sont assez fortement implantés en Kabylie, dans l’Aurès avec les
villages chaouias, les cités du Mzab et les tribus touaregs de
l’extrême Sud sont des amazigh métissés de Noirs. L’affirmation
culturelle amazigh date surtout de la constitution des États
indépendants du Maghreb. Les nouveaux pouvoirs ont cherché plutôt à
réaliser l’unité nationale qu’à aider les aspirations régionalistes.
Leur adhésion à la Ligue arabe, leur politique d’arabisation fondée sur
une scolarisation intensive ont suscité un sursaut amazigh. Celui-ci
s’est manifesté, en 1976, lors du projet algérien de charte nationale
qui ignorait volontairement l’identité amazigh. Tizi-Ouzou fut le siège
de plusieurs manifestations violentes depuis 1980.Les Amazighophones ne
se satisfaisaient pas du seul département "Cultures et dialectes
populaires" de l’université d’Alger et nombreux étaient ceux qui
réclamaient l’introduction d'amazigh à l’école. Mais la revendication
culturelle amazigh ne semble pas faire barrière à la notion
politique et économique du "grand Maghreb".
Sce:amazighforumactif